Catégories
Algérie

Algérie 2005: eaux usées

2005 61 ans

J’ai rendez vous à Lausanne avec Nour Ed Dhin, qui travaille pour le bureau suisse STOCKEAU très impliqué dans la recherche d’activités en Algérie. Je lui ais envoyé mon dernier CV à l’appui de ma candidature pour le poste de chef de mission de suivi et contrôle des travaux de la station de traitement de Tiaret, sur les plateaux à mi-chemin entre Alger et Oran.

Comme convenu il passe me prendre à mon hôtel, avec sa Mercédès ce matin et nous commençons à deviser pour faire connaissance pendant le trajet. J’arrive directement du Sénégal où je viens de terminer ma dernière mission. Mais je n’ai pas encore déménagé de Dakar. Je suis accompagné de ma jeune et jolie femme, Bintou, africaine nigérienne de 25 ans, avec laquelle je me suis marié 3 fois, la dernière au Sénégal il y a deux mois.Il est intrigué par mon CV? où l’on me voit sauter d’un pays à l’autre, sans jamais mentionner une résidence principale. Serais-je un ingénieur SDF ? Ben oui, j’en conviens aisément, c’est la formule la plus adaptée à mon cas, puisque les missions à l’étranger s’enchainent, et qu’entre deux je vis à l’hôtel en France ou en ballade autre part, éventuellement en visite, voir même hébergé chez des copains. Bref, le cul entre deux chaises…Tout simplement parce que je n’ai pas d’engagement particulier, excepté avec Bintou pour laquelle je loue depuis quelques années un studio à Toulon. Ce qui lui permet de mener une vie de bâton de chaise pendant que je bosse en Afrique, où je mène moi aussi de mon côté une vie mouvementée.

Ainsi à présent après m’avoir retrouvé au Sènégal depuis quelques mois, elle m’accompagne chez Stucky, en vue de poursuivre sa vie avec moi en Algérie.

Nous arrivons à son bureau, et Sabri me déclare d’emblée que chez Stucky, la règle veut qu’un ingénieur parte toujours seul en début de mission, pour reconnaître les lieux, et si les conditions le permettent sa femme le rejoindra un peu plus tard au frais de la Cie Stucky. Sur le moment je suis un peu étonné, mais je comprendrai plus tard, en Algérie. Donc Bintou va rentrer chez ses parents à Niamey, et me rejoindra quand la situation sera éclaircie.

Nour Ed Dhin satisfait de mon CV et de ce premier contact est pressé de me mettre en place en Algérie. Nous sommes le 15 décembre, il demande illico à sa secrétaire de me prendre un billet Aller-Retour et d’obtenir sur mon passeport le visa provisoire pour l’Algérie. Départ prévu ensemble le 10 janvier. Nous signons le contrat, et Bintou retourne avec moi à Paris, où nous nous rendons chez Marco, à Belleville. Je sonne à la porte d’entrée, et une voix me demande qui suis-je et si j’ai une invitation pour venir chez Marco! Quelques secondes et la porte d’entrée s’ouvre, nous montons les escaliers et en haut, voilà Marco et Patrice (un motard de mes amis au Niger). Marco est très fatigué à la limite de l’épuisement et tient le coup en fumant, comme d’habitude, des pétards. Il paraît content de nous voir et de parler avec Bintou, et quand il apprend qu’elle retourne prochainement au Niger, il lui passe commande, à envoyer le plus tôt possible par avion, de bibelots et verroteries nigériens pour les ajouter à la vente africaine qu’il organise chaque année à son appartement peu avant Noel.

Nous discutons un moment, et je réalise que Marco sait qu’il n’en a plus pour longtemps, bien que fondant encore un peu d’espoir sur les résultats des dernières analyses qu’il attend sous peu. La discussion se poursuit mais il manque la pêche, la volonté, la persuasion qui caractérisent habituellement ses propos.

Puis il s’excuse de sa fatigue et nous le quittons, navrés au fond de nous même, alors que d’autres amis arrivent pour lui installer une lampe de lecture au dessus de son lit. Lorsque je lui serre la main avant de partir, il me dit qu’il lui reste seulement quinze jours à vivre. Je ne sais que répondre..je l’embrasse et j’y vais….

Je ne reverrai plus Marco, ni vivant, ni mort.

Puis nous partons Bintou et moi, voir mon frère Olivier qui est au ski à Vars. Et enfin deux, trois jours après j’amène Bintou à l’avion pour Toulon car plutôt que de retourner voir ses parents au Niger, elle préfère reprendre sa vie de bâton de chaise à Toulon.

Début Janvier 2005, en vacance en France et avant de partir en Algérie, dans le TGV pour Lausanne, point de départ de ma nouvelle mission en Algérie, je rencontre les gars de l’Arche de Zoé, qui rentraient de leur mission humanitaire, déclenchée suite au Tsunami du 26 décembre 2004.
Je les prends pour des pompiers, vu leurs uniformes; ce n’est que plus tard que j’ai compris qu’il s’agissait de l’Arche de Zoe. Comme d’habitude, je pose pas mal de questions, mais il sont plutôt discrets. Pour les dérider, je leur dit que je suis ingénieur hydraulicien du HCR, pour lequel que j’ai réalisé des missions en Afrique…etc. Ce qu’ils me livrent alors c’est qu’ils ont passé leur temps à ramasser des cadavres, innombrables, dans une odeur pestilentielle.
Puisqu’ils ont opéré à Banda Hache, une sorte de presqu’île, je leur demande comment ils ont fait pour rétablir la délivrance d’eau potable aux survivants.
Et ils me parlent du travail accompli par des ONG.
Mais notre discussion est assez vite interrompue par l’arrivée de leur responsable…, qui s’informe de mon identité, et me prie de laisser ses gars tranquilles, car ils sont fatigués par le voyage retour, et bien sûr par leur mission. J’étais loin de me douter, que plus tard, j’allais les précéder de peu au Tchad où ils allaient défrayer la chronique….mais ceci est une autre histoire (voir § Tchad).

https://www.francetvinfo.fr/monde/video-l-horreur-du-tsunami-du-26-decembre-2004_781621.ht

Le temps passe et je reçois un appel de Sabri qui m’invite à venir le rejoindre à Lausanne, d’où nous partirons ensemble en Algérie.Pendant le voyage Sabri me donne, entre autres trois conseils: ne pas parler du terrorisme, ne pas parler de la condition de la femme algérienne, ne pas parler de la religion.

A l’arrivée à Alger, notre partenaire algérien Bendali, directeur du bureau études algérien ENHYD, nous y conduit, au siège à Cherraga dans la banlieue d’Alger. Puis retour à Alger à l’hôtel Al Djazaîr pour y dîner et y passer la nuit. C’est là que Sabri me remet de la main à la main 1000 euros pour alimenter ma caisse de chantier (après lorsque j’allais les voir tous les 6 mois en France pour prolonger mon visa, j’en revenais avec des billets dans les chaussettes, ce qui facilitait les passages en douane).

Alger: architecture coloniale conservée.

Ensuite il repart en Suisse, et le lendemain Bengali vient me chercher à l’hôtel pour me conduire à la Willaya deTiaret et me présenter au Wali (le préfet). Au passage à El Biar, un quartier de bonnes familles d’Alger, nous prenons Bachir Djaout, qui est mon adjoint sur le programme de construction de la STEP (station d’épuration) de Tiaret.

Nous en avons pour trois heures de route, au cours desquelles la conversation va bon train. A l’inverse des propos de Sabri, Bendali commence par me demander si je n’ai pas peur de monter à Tiaret, à cause du terrorisme. Moi, j’observe que eux n’ont pas peur, alors pourquoi moi? Puis il me parle de l’opinion des français sur les musulmans et la manière dont ils traitent leurs femmes. Moi, je ne formule aucune opinion sur ces sujets, mais demande à Bendali des éclaircissements.

Bla, bla, bla…le temps passe. La plaine fait place à la montagne et nous progressons sur une route sinueuse, la neige commence à tomber et finalement nous atteignons la zone des plateaux et Tiaret. Directement à l’hôtel Bouazza le seul de la ville, dont il nous est interdit de sortir sans être escorté par un inspecteur de police en arme.

Entrée de l’hôtel Bouazza à Tiaret

Nous visitons alors un grand appartement que Bendali a loué pour moi à l’hôtel et ce dernier me fait remarquer qu’il y a trois chambres et que je suis seul. Dans ces conditions accepterais-je d’héberger Bachir dans l’une d’entre elles? Je réfléchis un peu et finalement j’accepte, considérant que Bachir est mon second pour le boulot, et qu’il paraît calme, poli et discret; bref qu’il a une certaine classe.

Hotel Bouazzi dans mon appartement.

Puis Bendali nous emmène à la willaya. Le Walli est absent mais nous allons saluer M. Ramoul le directeur du projet, un ancien gradé de l’armée nationale. Enfin il est l’heure pour mes deux collègues de retourner sur Alger pour préparer le déménagement du matériel et des documents nécessaires. Alors, slama, bonne route et à bientôt. La semaine prochaine, OK? OK, ça ira, à lundi donc.

Mon coin salon.

Et je me retrouve tout seul dans mon appart, mais j’ai envie de faire un tour à la découverte de la ville. On m’affecte donc un inspecteur en arme et nous marchons vers le centre ville. J’avise un bistrot et invite mon cicérone à boire un verre avec moi. Naturellement il n’y a pas d’alcool et je me contente d’un jus de fruit, tandis que le flic commande un thé à la menthe. Cependant il me précise qu’il n’y a pas de problème, il y a à Tiaret quelques établissements qui servent de l’alcool aux étrangers. Cool! puis la nuit tombe et il temps de rentrer car il ne serait pas prudent de traîner la nuit dans les rues de Tiaret.

Quelques jours s’écoulent, et je me fais conduire au chantier à quelques kilomètres. J’y rencontre Proust détaché par un bureau d’études allemand (de l’Est) pour contrôler le travail de l’entreprise Cosider, une des plus grosse d’Algérie. il a son bureau de chantier dans un conteneur et il m’explique qu’il effectue déjà le suivi de Cosider, et donc que je n’ai pas de soucis à me faire, je ne serai pas débordé par le travail. Ça c’est son point de vue, mais moi je ne suis pas venu ici pour me tourner les pouces mais pour gérer le programme de construction d’un station d’épuration des eaux usées, dimensionnée pour 450.000 habitants (répartis dans plusieurs villes).

Puis ils me fait visiter le chantier, où nous ne tardons pas a croiser Younsi, le conducteur de travaux de Cosider.

Et les voilà qui se mettent à discuter tous les deux, apparemment ils ne sont pas d’accord et ils haussent le ton. Alors ça , ça ne me plait pas du tout. Je leur demande de se calmer mais ils reprennent de plus belle leur diatribe.

Du coup, c’est à mon tour de pousser un coup de gueule, et ça les calme. Il ne faut pas supporter que les gens s’énervent sur un chantier, surtout s’agissant d’ un programme important incluant beaucoup de monde.
Si ça commence sur le chantier, alors ça va se poursuivre pendant les réunions et se sera la pagaille. Nous sommes ici des gens de bonne éducation et nous allons faire chacun le nécessaire pour éviter la pagaille. Voilà le premier discours que je leur sers.

Je vais ensuite visiter nos bureaux, une belle villa dont la construction n’est pas encore tout à fait terminée. Il y a plusieurs bureaux, pour le Directeur national du Projet, puis pour moi le chef de la mission de contrôle, pour le secrétariat, et pour les deux experts, tunisien et turc, qui ne vont pas tarder à arriver.

Très bien, à partir d’aujourd’hui je serai chaque jour sur le chantier de 08h à 17h, et plus lorsque nécessaire.

Le lendemain c’est samedi matin, et je vais donc au chantier dire bonjour à Proust et parler un peu du projet. L’entreprise Cotiser est en week end, et l’après midi Proust se propose de me faire visiter la région, avec son chauffeur qui nous conduit vers une ferme abandonnée. Au bout d’une allée complantée d’arbres, un corps de bâtiment à l’ancienne, avec un toit fait de tuiles importées de France. Une petite étable proche de la route où dort une âne. Je propose d’aller visiter, au bout de l’allée la résidence, mais le chauffeur refuse soulignant le danger éventuel de tomber sur des terroristes.

Les cimetières français profanés (1):

Un peu plus loin, il nous fait visiter un cimetière français, qui avait été profané par des islamistes, il y aurait une vingtaine d’années. Caveaux de famille endommagés et dalles de fermeture cassées, pour en extraire les corps afin de les dépouiller de leurs bijoux et même des dents en or. Un corps retrouvé avec une pelle enfoncée dans l’anus à l’époque, selon les dires du jeune chauffeur de Proust, natif du village et conformément aux préceptes de l’Islam, toutes statues et inscriptions détruites. Bachir m’expliquera plus tard que bien des cimetières musulmans ont subi le même sort de la part des terroristes intégristes.

Proust m’indique que 4000 cimetières français ont été ainsi profanés à travers l’Algérie. Les corps exhumés ont été redescendus, certaines dalles refaites et les enclos nettoyés. Pour sécuriser les morts et éviter que ces profanations dans les cimetières français ne se poursuivent, il y en a déjà beaucoup dans la région de Tiaret, le Consul de France à Oran, sera présent la semaine prochaine pour faire le point des actions à entreprendre.

La gendarmerie

Lorsque nous quittons le cimetière, un 4×4 vert de la brigade de gendarmerie d’une ville voisine, s’arrête à coté de nous, et on nous intime l’ordre de le suivre jusqu’à la dite ville. Là nous sommes reçus et interrogés par le chef de brigade, qui après avoir téléphoné à sa Direction d’Oran, nous indique que nous ne sommes pas autorisés à circuler en rase campagne, en raison des risques encourus. Puis, après nous avoir longuement interrogés sur nos activités dans la Willaya, il décide de nous escorter pour notre retour jusqu’à Tiaret.

Fin de la promenade dominicale.

Le racisme de Proust

Pendant notre retour Proust ne cesse de déblatérer contre les arabes, particulièrement les ouvriers du chantier, qui selon lui ne sont que des bons à rien, ne connaissent que le « travail arabe » et ne feraient rien de bon si lui n’était pas là pour contrôler ces incapables. Pour ma part je déteste le racisme en général, et celui dont il fait preuve maintenant en particulier. Mais au lieu de garder cela pour moi, et de mettre mon mouchoir dessus, je rapporte bien imprudemment ces propos à Bendali, mais sans penser pour autant nuire à Proust. Le bruit se répand cependant parmi les intervenants du chantier, notamment Younsi, qui le reprennent et l’amplifient. Finalement ce racisme anti-arabe, pour le moins malvenu en Algérie parvient aux oreilles du Wali, lequel vient assister à notre première réunion mensuelle, et devant tous il sermone Proust pour ses propos racistes, et lui intime de faire très attention à l’avenir, car en cas de récidive, lui le Wali s’occupera personnellement de son cas. Et un Wali n’est pas n’importe qui dans les pays du Maghreb.
Proust ne répond pas, ne présente pas d’excuses non plus. Il pique du nez dans les plans étalés devant lui.
Evidemment il apprendra vite que c’est moi qui ait rapporté ses propos à Bendali, qui les a rapportés à Rachid, un ingénieur influent de l’Administration, ami du Wali. Les responsables allemands de la société qui l’emploie avise leur Siège, qui donne en retour deux mois à Proust, son préavis contractuel pour quitter le chantier.
Et je comprends vite que depuis ce jour Proust me déteste mais n’en dit rien pour mieux réussir à me piéger et à me porter tord pour se venger.

Il m’invite ainsi souvent à partager quelques bières dans son appartement – nous habitons le même immeuble – moi au premier et lui au quatrième. Au cours de ces apéros il essaye de me faire dire du mal des algériens, de l’Administration, de Ramoul le Directeur National du Projet…etc. Mais de nature, je ne suis pas enclins à baver sur les gens surtout quand je travaille pour eux.

Les cimetières français profanés (2):

Dans la semaine je rencontre le Consul, et il m’explique que la méthode retenue pour assainir ou protéger les cimetières consistera à remplir les caveaux de familles avec des mètres cubes de sable. 4000 cimetières de 40 caveaux en moyenne, dispersés à travers l’Algérie, c’est un sacré programme, et le Consul me demande puisque je suis à Tiaret pour un moment si j’accepterais, en plus de mon travail à la station de traitement de m’occuper, gracieusement, de ce projet au moins pour la région d’Oran, dont Tiaret fait partie.
Je réserve ma réponse, mais franchement je préfère passer mes week-end à lutiner des jolies filles, plutôt qu’à ré-enterrer les morts.

Expert non spécialisé

Dès le lendemain, lundi, je punaise le plan d’ensemble de la station de traitement sur un mur de mon bureau, et je m’attaque à son analyse. De fait je n’y comprends pas grand chose, et ce n’est pas surprenant parce que ma spécialité c’est les STEP (Station de Traitement des Eaux Potables) et non pas les STE (Station d’EPuration). Je m’en étais confié à Sabri lors de notre premier entretien à Lausanne, mais pour lui ce n’était pas un problème, il était persuadé que je me mettrai vite à niveau, en m’appuyant par exemple sur les deux experts prévus dans notre mission de suivi et de contrôle.

Une telle situation s’est reproduite plusieurs fois au cours de mon parcours professionnel. Quand il s’agit de contrôle de travaux, en général, tout ce passe bien. Mais s’il s’agit d’environnement ou d’études institutionnelles ou de politique sectorielle de développement c’est plus difficile. Je n’ai pas été formé pour ça.

De fait à l’arrivée du premier de nos experts, Amor, que nous n’allions pas tarder à surnommer Monsieur l’Ambassadeur, je lui demandais de m’expliquer quel était ce grand cercle au milieu du plan. Mais voilà il n’entendait pas me renseigner car il voulait être calife à la place du calife (moi). Il s’arrangeait toujours pour m’en dire le moins possible.

Heureusement que Bengali et Bachir se sont révélés plus prolixes, m’expliquant que ce grand cercle était le décanteur lent, la construction en béton la plus importante de la STEP: un bassin de 60 mètres de diamètre et de 7 mètres de hauteur.

Il était en cours de ferraillage et l’on pouvait y voir au travail de nombreux ferrailleurs, exécutant les ligatures des armatures entre elles. Il y en avait certains qui travaillaient en hauteur, les pieds sur les fers horizontaux et le corps retenu par une large ceinture. Cependant je constatais que leur équipement vestimentaire était particulièrement en mauvais état. Certes ils avaient les chaussures de chantier obligatoires mais ils ne pouvaient pas porter de gants. Ça les rendraient incapables d’effectuer les ligatures correctement. Alors ils travaillaient mains nues sur des fers glacés, et de plus leurs protections contre le froid étaient dérisoires, compte tenu de la neige qui tombait et du vent qui soufflait sur le site. Ils leur fallait en effet, travailler sans relâche, avec des quarts de jour et de nuit, alors même que la température tombait en dessous de zéro. Des pantalons et des anoraks déchirés, des chiffons autour de la gorge, des pull over troués carrément hors d’usage. J’en faisais la remarque à Younsi, qui promettait de remédier à tout ça.
Nous verrons ça lors de la prochaine visite de chantier hebdomadaire, et je suivrai cette affaire de près.

Ceci dit nos bureaux étaient gardés par des militaires armés de kalachnikov. Bonjour l’ambiance.

Je signale qu’un jour, un de ces gardiens armés avait oublié son téléphone dans le bureau de Rachid. Avec le portrait de Ben Laden sur son écran de veille. Un terroriste armé d’une mitraillette, chargé de notre sécurité ? Le Wali est vite averti et le gardien est arrêté sur le champ. Nous ne l’avons plus jamais revu.

Maintenant Bachir et Bendali étaient de retour et cette fois-ci nous avons rencontré le Wali (le Préfet) qui nous recevait aimablement et nous assurait que tout serait fait pour que nous puissions travailler en toute sécurité.

Il faut savoir que durant dix années de terrorisme chaque famille algérienne avait été touchée par les atrocités des terroristes. Du reste en face de mon hôtel, un an plus tôt deux techniciens italiens avait été froidement abattus, mitraillés, au petit matin en descendant de leurs chambres.

Une fois la journée de travail terminée à 16 h nous allions Bachir et moi, et d’autres, déguster des petits gâteaux accompagnés d’un café au lait dans les pâtisseries de Tiaret. Voilà qui remplaçait l’apéro.

Mais de mon coté, j’achetais des bouteilles de vin rosé et j’invitais régulièrement Bachir, et nos deux experts, tunisien et turc à venir boire un coup après le diner dans mon appartement. Ainsi on faisait plus ample connaissance, et ça laissait à l’amitié l’opportunité de s’installer entre nous.

En Algérie, nous sommes en danger de mort. Alors vivons!

Il y avait aussi quelques établissements qui servaient de la bière, du vin ou du whisky. Bachir y était trés à l’aise avec tout le monde, notamment le patron et les filles, cependant plutôt rares dans ces lieux. La musique arabe chaabi (populaire) déversait ses chansons dans un vacarme assourdissant et les nuages de fumée envahissaient l’atmosphère close et sans ouverture, pour ne pas attirer le chaland. Tout le monde était content de rencontrer un français et parfois de parler avec lui et Bachir. Ces conversations n’allaient pas très loin mais se déroulaient dans une bonne ambiance.Et puis parfois on ramenait une fille à l’appartement qui me faisait profiter de ses charmes. J’avais ainsi, pris mes habitudes avec Fatima, dont j’appréciais particulièrement la plastique.

Bachir préférait, quant à lui, garder son argent pour acheter les cahiers et les livres d’école de sa fille.

Pour le travail je m’étais organisé avec lui, mon adjoint, spécialiste en béton. Il effectuait les contrôles lui même pendant la semaine, et j’acceptais d’effectuer à sa place les contrôles de bétonnage pendant les week-ends pour lui permettre de visiter, chaque semaine sa famille à Alger.

Micmac avec Fatima à l’appart:

Cependant une fois, alors que j’étais en mission en France, il était resté un week end pour assister, précisément à un coulage de béton. Et s’ennuyant seul le dimanche après midi, il téléphonait à Fatima pour avoir de la compagnie. A peine était-elle entrée dans l’appartement, qu’un brouhaha se fait entendre dans les escaliers, puis des coups violents sur la porte. Bachir ouvre et immédiatement trois hommes surgissent à l’intérieur. Le plus jeune se rue sur Fatima, et la secoue en l’insultant et en lui tirant les cheveux. Il s’agit du fils Bouazza, qui déclare qu’il est fiancé à Fatima et qu’il est venue la ramener. Puis avec ses acolytes ils la poussent dans les escaliers en lui assénant des coups de poing et de pieds. Et il déclare qu’il ne veut plus jamais la voir dans notre appartement dont il fera effectivement surveiller l’entrée, jour et nuit par un gardien, positionné près de la porte d’entrée de l’immeuble.
A mon retour de France, Bachir me présente ses excuses pour ces évènements. Exit donc Fatima.
Mais tout ceci n’est finalement pas très grave car avec l’assistance de Bachir, j’ai pu trouver une remplaçante à Fatima, et qu’il m’est arrivé malgré tout de lutiner encore avec elle, de temps en temps en l’absence de son cerbère. Pas besoin d’aller la chercher elle revenait toute seule…

Jack le fou:

Parfois c’était mon tour d’aller passer le week end à Alger, et je résidais dans la villa de Cheraga ou j’avais ma chambre attitrée. Plusieurs ingénieurs y demeuraient en permanence, et je sympathisais avec l’un d’entre eux, Jack, qui passait son temps à calculer les lignes haute tension, en fonction de la hauteur et de l’espacement des poteaux. Je remarquais que Jack buvait sec, avec une affection particulière pour le vin rouge. Les placards de la cuisine étaient pleins de cadavres (les bouteilles vides) et ceux de son bureau aussi.
Finalement lui, moi et d’autres, formions un groupe soudé et fréquentions le week end, et parfois en semaine, les bons restaurants d’Alger, et aussi les boîtes de nuit.

Dans les boîtes Jack dansait comme un fou. Pénétré par la musique, seul sur la piste car il faisait le vide autour de lui, par ses déplacements rapides, angulaires et imprévisibles, il tournait et retournait sur lui même, il agitait, balançait les bras en gestes grandiloquents, et était capable de danser ainsi au centre de la piste durant des heures. Alors on lui attribuait le surnom de Jack le Fou.

Un soir, nous le déposons à sa demande dans une boîte à El Biar, quartier huppé dAlger, où les honorables pères de famille venaient s’arsouiller jusqu’à plus soif. Il entendait revenir par ses propres moyens à la villa.
Mais son absence à la villa se prolongeant, nous décidons de retourner le chercher et nous le retrouvons bien là où nous l’avions laissé. Envouté, il danse, danse et danse encore. Il n’y a que des hommes dans la boîte, ils nous disent que Jack est fin saoul, et qu’il serait bon de le ramener dormir maintenant, d’autant que l’établissement est sur le point de fermer. Évidemment Jack le Fou ne veut rien savoir, mais je paie ses consols car il est venu sans argent, et avec l’aide des buveurs nous arrivons à le sortir du night, l’air frais paraît lui faire du bien, et à le faire entrer dans la voiture. Je lui dis qu’on rentre tous à la villa de Cheraga. Alors il déclare qu’il va conduire, lui même! Il est saoul et il n’en est pas question, d’autant plus qu’une épaisse brume recouvre la ville.

Nous insistons pour qu’il rentre avec nous, mais il ne veut rien entendre. Furieux il claque la porte et nous voyons sa silhouette, à pied et sans argent, disparaître dans le brouillard.

Que faire ? Nous rentrons donc à Cheraga sans lui.

Toutefois la nuit je me réveille en sursaut et je descends pour voir si Jack est rentré. Que nenni! Alors je me fais un soucis d’encre, car les quartiers ne sont vraiment pas sûrs à Alger, la nuit, surtout à pied et sans argent. Le terrorisme, et ses horreurs qui sème la mort depuis plus de dix ans n’est pas tout à fait terminé! Puis je me recouche.

Au lever du jour je redescends encore pour voir si Jack est rentré. Surprise, il est là, assis à son bureau en train de calculer ses lignes HT. Parfait, rassuré je ne le dérange pas et remonte me coucher. Quelques heures plus tard, je lui demande ce qu’il a fait après nous avoir quittés. Et voilà ce qu’il me raconte:

« je marchais depuis peu de temps lorsque j’ai eu la chance de croiser un taxi. Le chauffeur me dit qu’il est dangereux de marcher seul la nuit dans le quartier, et me demande où je veux aller? Au Triangle , en ville. Il me propose de m’y emmener, mais je n’ai pas d’argent sur moi pour lui payer la course. Qu’importe il accepte de m’y conduire quand même pour m’éviter de mauvaises rencontres. Bien sûr, je le remercie et descends au Triangle. C’est un complexe nocturne composé de trois night clubs. Dans l’un on passe de la musique de jazz, dans l’autre de la musique arabe, sur laquelle les filles font la danse du ventre, et enfin dans le troisième c’est du disco. Va pour le jazz, je rentre dans la boîte, il y a un orchestre, et je me commande un whisky sec. Puis je danse à ma manière comme d’habitude. Le boss voyant que je suis un français s’approche de moi pour discuter et nous sympathisons. Quand je lui dis que je n’ai pas d’argent pour payer, pas grave, il m’invite à commander ce que je veux, c’est lui qui offre. Sympa.
Donc nous picolons tous les deux ensemble et quelque temps après nous empruntons deux saxo à l’orchestre et nous voilà même en train de jouer du saxo de conserve. Bref on s’est bien marré toute la soirée, et à l’aube il appelle un taxi, lui dit de me conduire à Cheraga et règle à l’avance la course pour moi. Merci Abdallah, je reviendrai au prochain week end. « OK, Jacques tu es le bienvenu, quand tu veux. »

Moi: « et alors t’as dormi un peu, pour récupérer et reprendre tes calculs? « Non, juste une douche et un café noir, et hop au travail. J’ai l’habitude de faire comme ça, je travaille la nuit, en rentrant de bringue! »
« Ben dis donc, t’as quand même une sacrèe santé. Et tu sors seul ou t’as une copine avec toi? »
Oui t’as raison je sors souvent avec une algérienne que j’aime bien, Khadijah, d’ailleurs regarde ça ». Il ouvre le tiroir de son bureau et l’air futé il en sort un petite boite, un écrin, qu’il ouvre devant moi: à l’intérieur une belle bague. « Oui, je vais lui faire cadeau de cette bague, on va se fiancer ».
Franchement ça me fait plaisir, une fiancée c’est peut- être ça, qui pourrait le calmer, Jack le Fou.

Bon, maintenant il va se reposer un peu, remonte dans sa chambre, et moi je fais de même. Ma chambre est en face de la sienne et il me semble entendre des bruits et des soupirs qui ne laissent aucun doute. J’en déduis que c’est sûrement Khadijah qui dort, ou plutôt ne dort pas avec lui.

En fin d’après midi, nous avons tous récupéré de la nuit précédente et il me présente sa dulcinée algérienne.
Elle est vraiment canon, jeune et désirable.
« Salam alekoum, khadija, labass alik? Koulchi Mzien? »
ce qui signifie « bonjour Khadijah, comment ça va, tout va bien? » « Labas, barak alah oufik »  » Ca va, grâce à Dieu »….etc.

Puis avec Jack et Khadijah nous parlons en français, et assez rapidement elle s’étonne de ce que je sois seul et sans compagne. Elle me propose de me faire rencontrer Salima une de ses amies, qui pense -t-elle devrait me plaire. OK, rendez vous demain soir ici même à 20 h.

Soirée de rêve à Carthage:

Le lendemain, à l’heure dite je descend de ma chambre et tombe sur le trio tragique ou plutôt magique: Jack, Khadijah et Salima en train de boire du rouge dans la cuisine. Attention, c’est que Salima n’est pas mal du tout. Et en plus elle est à l’aise et parle bien le français. Je suis content à l’idée de me lier avec elle, en espérant la retrouver chaque fois que je descendrai de mes plateaux enneigés. Pour commencer notre relation sous les meilleures hospices, j’invite tout le monde à dîner au restaurant « le Carthage » (du nom de ma ville natale) situé à coté du 5 étoiles Al Jazaïr ( l’Algérie) où je suis déjà descendu plusieurs fois.

Alger: le port de pêche.

«  »Les filles, aller donc vous préparer, et on va y aller!

Nous passons, Jack et moi une soirée délicieuse accompagnés de ces deux jeunes femmes bien maquillées, les yeux mis en valeur, soulignés de khôl. Elles sont habillées avec des caftans traditionnels, de couleurs vives, fermés par de grande boutonnières avec une multitude de petits boutons dorés. Je connais bien le restaurant et nous devisons gaiement avec Mohamed, le patron des lieux. Un petit orchestre joue de la musique andalouse, violon, guitare et dar bouka pour le rythme. Ce qui me plaît bien c’est que les filles semblent aussi ravies que nous. Ce ne sont pas des emmerdeuses qui font la gueule comme on en rencontre trop souvent.
Faut dire que les français ont vraiment la cote en Algérie, surtout les ingénieurs qui viennent participer à d’important projets de développement. Et puis nous sommes dans une période charnière, ou les attentats et les terroristes à cause desquels les gens ne sortaient pas de chez eux, sont de moins en moins actifs. Alors les algériens recommencent à vivre, et l’ambiance devient carrément festive. Bien que à Alger il y ait encore beaucoup de barrage de contrôle sur les artères principales.

Quoiqu’il en soit nous nous sentons heureux d’être là tous ensemble, décidés à passer une bonne soirée (qui me changera de celles de Tiaret).

Au menu, après l’apéritif, puis l’inévitable chorba bien chaude, plat national de tous les pays du Magrehb, puis une bastilla aux pigeons et aux amandes, le tout arrosé d’un bon vin rosé ou rouge du Maroc. Les dames aussi boiront, discrètement, c’est arrangé avec Mohamed. Comme dessert des cornes de gazelles, et des dattes fourrées tunisiennes servies avec du thé à la menthe. Et après, si l’on veut on pourra fumer au narguihlé de la chicha aux pommes ou aux fraises.

Puis nous ne rentrerons pas trop tard à la villa, pour faire plus ample connaissance. Ces moments de rencontre où l’on se découvrent sont particulièrement agréables, pour l’instant nous sommes libres, c’est la découverte. C’est une période de grâce. Sans entrave, sans soucis . Juste le plaisir d’être ensemble et de savourer à l’avance le bonheur d’aller, tous les deux plus loin.

Durant le repas la conversation va bon train sur nos activités professionnelles respectives et sur le changement qui s’opère en Algérie que j’ai signalé plus haut. A la fin du repas, surprise, Jack se lève, fouille dans la poche de son pantalon et, se dirigeant vers Khadijah, en extrait l’écrin, puis la bague, preuve irréfutable de son amour pour elle, qu’il n’a rencontrée que tout récemment. On nage en plein romantisme.

Le violoniste s’approche tout près de khadijah, et en solo lui distille à l’oreille une musique romantique, composée à Fès ou quelques siècles avant en Andalousie. Et le couple jeune et généreux se lève pour un slow langoureux. A la fin du morceau choisi, Jack s’approche de l’orchestre pour demander un rythme plus rapide; la Dar Bouka (petit tambour tenu sous le bras par le percussionniste), la Dar Bouka s’anime et anime Jack le Fou qui attaque en solitaire une de ses danses débiles dont il a le secret. On ne se refait pas… Une fois son délire obsessionnel et mouvementé terminé, c’est à mon tour d’inviter Salima, et je me colle à elle, lui murmurant des mots sucrés au creux de l’oreille, et ce premier instant de proximité sensuelle, est une entrée en matière pour le second acte, beaucoup plus intime qui se met progressivement en place dans un futur chaque instant plus proche, et qui commence sérieusement à envahir ma psyché.

Voilà, nous y sommes l’instant jouissif est arrivé, et même bien arrivé parce que, les préliminaires passés, depuis un moment je suis en train de travailler Salima par derrière, savourant chacun des allers retours qui nous rapprochent et nous accrochent l’un à l’autre. Rien que de très banal finalement, mais paradoxalement on y trouve à chaque fois du plaisir, et on y revient toujours. Et puis soudain un évènement se passe que je n’ai toujours pas oublié. Probablement saisie d’une inspiration soudaine, Salima tourne son visage vers moi, et je suis frappé par l’expression, le message visuel, la communication violente qu’elle projette, et qui m’atteint en me laissant stupéfait, un dixième de seconde….

Au lieu d’un sourire complice auquel je pourrais m’attendre, un rictus déforme son visage, d’ une intensité inhabituelle. Celui d’une bête sauvage, d’une lionne peut être qui m’appelle et qui m’attire. Lèvres déformées, muscles tendus, yeux brillants, c’est comme un aimant qui m’attire, que j’aime et je l’attire. J’appuie de la main gauche sur ces reins, je la tire par sa crinière et je fonds sur sa bouche, mêlant ma langue à la sienne, dynamique et agile, qui me fouille et me farfouille, me nettoie les muqueuses et mélange nos salives. Un instant le temps suspend son vol et la tempête se déchaîne, animée par une succession de spasmes violents, qui nous emportent tous les deux dans une autre dimension, nous nous écroulons haletants par terre, l’une sur l’autre, pour y retrouver peu à peu notre calme dans l’immobilité soudaine et le silence.

Me voilà avec la tête bien calée, entre ses deux seins, d’une douce tiédeur.

Maman, que je me sens bien!

Toutefois, les circonstances de la vie on fait que nous n’avons plus eu l’occasion de nous revoir et je le regrette bien. Je regrette aussi bien évidemment la disparition de Jack.

Sougueur ville de lupanars:

Encore une anecdote: Sougueur est une ville située à 20 km de Tiaret, qui a la réputation d’être un grand boxon.
Après les difficultés avec Fatima, Bachir tenait absolument à me brancher sur les avantages spécialisés de la ville. Il me conduit donc un soir à la sortie du travail vers un bordel de la ville, se gare devant la porte d’entrée et me laisse passer en premier. dans le couloir. Une porte est ouverte sur la droite; à l’intérieur de la pièce, une maman et ses filles. De joie elles m’applaudissent. Et c’est toujours la même réponse: les cahiers et les livres de sa fille de 17 ans. Bon, je paye la maman et on se casse. Quel romantisme. J’ai surtout envie d’aller au restaurant de la faculté pour boire quelques bières et oublier cette mauvaise passe. On retourne donc à Tiaret, c’est l’heure de l’apéro et beaucoup de monde est en train de boire: bières, vins ou même whiskies. Il n’y a que très peu de femmes, juste un petit groupe de danseuses, venues avec leur sono posé sur une table derrière laquelle elles sont tranquillement assises; elles passent des slows pour ceux qui voudraient bien danser. En fait pour faire une danse avec l’une d’entre elles il faut payer un petit ticket pour le temps d’un slow. Mais nombreux sont les amateurs et la liste est longue. Il faut donc que chacun attende son tour. Enhardi par l’alcool, je vais m’inscrire et paye le ticket, attend mon tour et vais danser. La fille est sympa, discute un tant soit peu, elle en arabe, moi en français, et au bout de 3 minutes la danse est terminée. Puis elle va voir Bachir et lui demande si on peut se revoir, elle et moi (les français ont la cote). Elle serait disponible à partir de 04 h du matin, une fois son business terminé. Moi, cette heure m’irait bien, c’est celle à laquelle je me réveille tous les jours et où je me dirige vers le petit bar d’en face pour le petit déjeuner.En même temps le patron, qui dort derrière le bar, ouvre son estaminet, met une musique sélectionnée pour le français, je me souviens de Julio Iglesias, et s’apprête à recevoir les fidèles, retour de la mosquée après la première prière.
Une fois rassasié je retourne à l’appartement, ouvre mon ordinateur et commence à travailler pendant environ 7h30. En fait il y a pas mal de boulot dans la gestion de programme, la direction de l’équipe de contrôle des travaux, la rédaction des rapports journaliers et mensuels, et l’assistance technique au maître d’oeuvre. Après je fais un peu de pédalage sur un vélo de salon, que j’ai acheté à Bab El Oued, et installé sur la terrasse intérieure. Puis la douche froide ou le bain bouillant. Enfin un petit peu de repos et départ pour le bureau vers 8h30.

Donc pour revenir à la danseuse ce ne sera pas possible, et de plus il est vivement déconseillé de rouler seule dans les rues de Tiaret à cette heure-ci. La sécurité s’améliore mais est encore loin d’être totalement assurée.

Bintou à Tiaret.

Maintenant que je suis bien installé en Algérie, il est temps que je fasse venir Bintou, mon épouse nigérienne pour me tenir compagnie. En accord avec mon employeur Sabri, je lui fais émettre un billet en France: elle prendra l’avion à Marseille pour se poser directement à Alger, où je l’attendrais et nous remonterons directement sur Tiaret, en voiture. Mais, changement de programme, au dernier moment je suis retenu le jour de son arrivée, par la visite d’une STEP à Constantine, et je demande à Bachir de l’accueillir à l’aéroport, avec une pancarte à mon nom, et bien sûr je la tiens au courant de cette modification. A son arrivée, au début de mon absence qui durera 2 jours, Bachir la conduira à Tiaret et l’installera dans un hôtel où elle pourra m’attendre eu sécurité. Lorsque je me pointe à cet hôtel, le jour dit à la tombée de la nuit, elle tombe dans mes bras, soulagée de me retrouver (après deux mois de séparation). Je comprends qu’elle était très effrayée par le problème du terrorisme, d’ailleurs elle n’a pas quitté sa chambre pendant ces deux jours d’attente.

Bachir qui ne veut pas s’immiscer dans notre intimité récupère ses affaires et quitte l’appartement pour un autre hôtel.
Ce déménagement pour lui n’est pas très agréable, car ses moyens ne lui permettent qu’un hôtel de seconde zone, dans lequel il est loin du confort de chez moi. Pour ma part, j’installe donc Bintou dans mon appartement, le lendemain de nos retrouvailles. Bintou est noire, et les algériens n’aiment pas les noirs. Les hommes, pas les femmes. Car beaucoup nourrissent l’espoir d’avoir un jour l’occasion de coucher avec une black. Quand pour notre repas de midi, j’emmène Bintou au restaurant, elle est le centre de toutes les attentions des hommes présents dans la salle à manger, et le patron nous introduit rapidement dans une salle annexe, où nous resterons seuls durant tout le repas. Je comprends que cette situation la gêne et je lui demande de ne pas s’en faire, mais je la sens déstabilisée. Je lui conseille de s’habiller un peu comme les femmes de Tiaret, avec un anorak noir, simple, que je lui achète, et je lui demande de ne pas se maquiller. Cependant je ne vais pas jusqu’ à lui demander de se voiler. Elle tient le coup quelques jours en suivant mes préceptes, et nous prenons nos repas à l’appart plutôt qu’au restaurant. Mais depuis son arrivée nous n’avons toujours pas eu les relations intimes de mise entre jeunes mariés: moi 60 ans et elle 25 ans!
Et elle finit par me demander, un beau jour, pourquoi je ne fais pas l’amour avec elle. Je lui réponds, un peu gêné que je suis fatigué par mon travail très difficile et lui demande un peu de patience avant que je ne retrouve ma passion. Mais elle est déstabilisée.

En fait après avoir gouté à toutes ces algériennes, mon désir à son égard s’est estompé. Situation complexe.
De guerre lasse elle décide peu après de s’habiller à l’européenne, pantalon de chez Morgane, bottes à talons hauts en cuir souple de couleur ocre-jaune, et gilet de chez, je ne sais plus qui, plus chapeau à plume. Le visage soigneusement maquillé selon la dernière mode en France. Avec une bonne odeur de Chanel n° 5. Tous ses vêtement sont neufs, d’un luxe inconnu des femmes de Tiaret et de leurs hommes.

Impossible de sortir comme ça en ville, elle va provoquer une émeute, et ce qui est plus grave attirer l’attention des terroristes qui détestent tout ce qu’elle représente.
Évidemment elle ne s’en rend pas compte, mais lorsque je lui demande de remettre l’anorak miteux que je lui ait acheté, et une paire de baskets elle refuse tout net, et entend bien aller au restaurant bien habillée. Ce jour là, nous n’avons pas mangé à midi. Puis après elle me déclare qu’elle ne va pas rester en Algérie où le mode de vie est insupportable. Et pourtant les femmes algériennes le supportent, le plus souvent cloitrées dans le salon de leur appartement dont elle ne sortent qu’avec l’autorisation de leur mari. Préparer la cuisine, faire le ménage, s’occuper des enfants, sans sortir de la maison, tel est la plupart du temps le lot des femmes mariées à Tiaret, qui n’est pas une ville particulièrement progressiste.

Bintou me parle alors d’une amie algérienne, rencontrée à Toulon dont les parents possèdent un hôtel pour touristes à Tamanrasset. Elles étaient convenues toutes les deux se voir en Algérie. En tout cas je lui dis de patienter à Tiaret jusqu’à la date de son billet retour.

Quelques jours après je réalise que la validité de mon visa doit être renouvelée. Or le renouvellement d’un visa doit être accordé par le consulat qui l’a accordé. Il me faut donc retourner en France , ne serait-ce que pour deux ou trois jours, et me rendre au consulat d’Algérie à Nice. J’explique à Bintou, et lui demande si elle veut m’accompagner. Elle ne le souhaite pas. Trop de fatigue et d’argent pour un voyage de deux jours! Avant de partir je demande à Bachir de passer régulièrement à l’appartement pour voir si tout va bien.

Et en arrivant à Nice, j’appelle Bachir pour avoir des nouvelles. « Mauvaise nouvelle, me dit-il sur un ton compatissant: ta femme a pris ses affaires et a quitté l’appartement ce matin. Elle a emmené ton ordinateur! »
Bon, qu’elle s’en aille, je m’en doutais un peu et du reste je la comprends, mais qu’elle me pique l’ordinateur c’est une catastrophe pour le projet, donc pour moi. Elle est peut être aller avoir sa copine à Tamanrasset?

Quoi qu’il en soit je passe au consulat d’Algérie pour mon visa. Je l’obtiens le lendemain et prends le prochain vol pour l’Algérie. Le chauffeur est venu me chercher et je rentre illico à Tiaret, que j’atteins le dimanche après midi. En arrivant je monte chez Proust qui habite au 4ème étage et au lieu de m’ouvrir la porte il me fait attendre un moment durant lequel j’entends un remue- ménage dans son appartement. Ils sont en train de déménager quelque chose. Puis il m’ouvre la porte, il est avec son copain, dont il m’avait annoncé l’arrivée, et ils ont l’air de se foutre de ma gueule. Proust termine la vaisselle, l’air détaché puis fini par me proposer un verre. Quoique voisin, il n’est pas au courant du départ de Bintou. Il n’a rien vu, rien entendu. J’ai vraiment l’impression qu’ils se foutent de ma gueule. Puis son copain me demande des renseignements sur l’Afrique, et les séjours que j’y ai effectué. En quoi ça les concerne? Pourtant comme il me servent et me resservent à boire je m’exprime librement et leur raconte quelques aventures, comme je suis en train précisément de le faire en écrivant maintenant.
En fait je n’en serais jamais sûr mais je pense que ma femme, Bintou est dans une chambre au fond du couloir.

Et puis finalement, les paroles d’une belle chanson de bringue tahitienne me reviennent à la mémoire:

« Rosalie elle est partie, si tu la vois ramène la moi.
Elle est partie tout en claquant la porte.
Elle est partie que le diable l’emporte.
Courir après ce n’est pas mon métier
C’est bon pour les chiens du quartier.
J’espère un jour apprendre qu’elle est morte
Qu’un gros camion la réduite en bouillie
Mon émotion ne serait pas trop forte,
Elle est partie, tant pis, tant pis, tant pis ».

Alors c’est pas la peine de se faire du soucis, attendons la suite des évènements.

Sur les conseils de Bachir, je vais trouver Raoul et lui raconte la petite histoire. Il me fait le reproche de ne pas l’avoir prévenu de l’arrivée de ma femme, car il sera tenu pour responsable de sa sécurité. Quand je lui parle de l’ordinateur il est furieux, continue à m’engueuler mais m’assure qu’il va s’occuper de sa récupération.
Et finalement une semaine après, Bintou est de retour avec l’ordinateur. Elle me dit qu’elle est allé voir sa copine à Tamanrasset, et qu’elle a passé avec elle une très bonne semaine. Copine, ou copain ?, that’s the question. Puis elle me répète qu’elle n’a pas l’intention de vivre à Tiaret, ce qu’ une fois encore je peux comprendre. Je lui redemande de rester encore quelques semaines jusqu’à la date de son billet retour. Peut-être pourrai-je la faire changer d’avis d’ici là. Mais la situation ne cesse de se dégrader et la veille du jour dit je l’amène à Zéralda, à proximité d’Alger où nous passons la nuit dans un hôtel pour sportif. Pas trop cher, mais pas trop classe! Un taxi doit passer la prendre le lendemain matin.

Nous nous disputons, pour des questions d’argent. Elle menace de se jeter par la fenêtre, ce ne serait pas, loin de là, sa première tentative de suicide depuis qu’elle est (de temps en temps) avec moi. Bon prince je lui remets un chèque d’une brique, pour pouvoir se recaser à Toulon ou ailleurs. Puis je la laisse partir, sans même lui faire la bise, avec son taxi.

Le départ de Proust

Quelque temps après c’est le départ de Proust, qui invite Bachir à prendre une verre avec lui dans son appartement . Bachir en redescend, disant qu’il regrette ce départ, car il a de l’estime pour Proust, avec lequel il a toujours bien travaillé. Puis il me conseille d’aller prendre moi aussi, un verre la haut au quatrième.
Ce que je fais, par politesse. Et là j’ai la stupéfaction d’entendre Proust déballer ses griefs et essayer de me foutre la trouille. Mais en réalité il a l’air d’en savoir long sur mon compte. Il est furieux et fait remarquer que chaque fois qu’il nous a invités, Bachir et moi, il a réussi à nous faire monter chez lui. Pourquoi? A moi de trouver. En fait je suis persuadé qu’il m’a enregistré à chaque fois.
Et ai-je compris ce que son copain est venu faire à Tiaret? J’imagine une enquête sur moi, il n’est resté que deux jours, le temps de m’écouter et de m’enregistrer. Et pourquoi m’a-t-il fait attendre avant de m’ouvrir la porte le dimanche de mon retour de France. Peut être bien qu’il avait fait boire Bintou pour enregistrer les éléments qu’elle pouvait donner sur moi? Bref il a réussi à m’inquiéter sérieusement sur ses activités avec Bintou pendant mon absence, avant qu’elle ne parte en taxi à Tamanrasset.
Bon exit , Proust, et place au nouveau chef de chantier, polonais de nationalité.

Quant à moi je suis inquiet et pour me rassurer je sors souvent le soir avec Bachir et la ronde des filles reprend à l’appartement. Nous faisons la connaissance de Brigitte, sympathique mais ayant passé l’âge. En bonne mère maquerelle, elle gère quelques filles bien gaulées. Et Bachir lui téléphone lorsque nous voulons les voir. On va alors les chercher chez elles, en voiture, et pour les débarquer discrètement dans l’immeuble, on les fait passer par une entrée de service. Auparavant elles ont fait les courses en ville, elles préparent le repas pendant que nous buvons tous du rosé, et nous mangeons et continuons de boire tous ensemble dans l’appartement.
Elles sont gentilles et disponibles après pour des activités d’alcôve, et nous les ramenons le soir vers minuit chez elles. Comme je suis un peu saoul, et Bachir un peu fatigué, je les ramène souvent seul, ce qui n’est pas vraiment conseillé à cette heure-ci où les rues sont désertes. Dieu est grand! tout c’est toujours bien passé.
C’est ainsi qu’avec Brigitte et nos copines nous passions pas mal de soirées d’hiver, dans une atmosphère amicale, sympathique et sexuelle. Jusqu’au jour ou Brigitte qui n’était pas de la première fraîcheur m’a demandé de coucher avec elle. Pour lui faire plaisir j’ai accepté, mais je peux témoigner que ça n’avait pas la même saveur qu’avec ses jeunes protégées.

Maintenant après les filles et l’alcool parlons de mon job.

Evidemment pour être exigeant avec mon équipe, je me devais de montrer l’exemple. Bachir témoignait de mon travail matinal, à l’appartement quand il était parfois contesté par M. l’Ambassadeur, par exemple.

La journée se poursuivait avec l’envoi sur le chantier d’un métreur qui devait compter le nombre d’ouvriers au travail, ça oscillait autour de 500, puis après avec Bachir, je descendais aussi au chantier pour la tournée commentée du matin. On y retrouvait Younsi et Proust, puis son successeur, pour plus d’informations. Plus tard après la tournée du soir, je pouvais rédiger une feuille sur l’avancement journalier de l’entreprise, avec les réserves éventuelles, avant de récolter celle de l’entreprise, ce qui me permettait de dresser notre rapport journalier. On n’était pas toujours d’accord avec l’entreprise pour des raisons qui lui appartiennent: camouflage par exemple de mal-façons.

Comme je l’ai déjà signalé, à mon arrivée en plein hiver le climat était très froid, ce qui nous empêchait de bétonner tôt le matin, devant attendre que la température augmente, au dessus de 5 degrés. En effet en dessous le béton ne fait pas prise et de plus l’eau de composition gèle. Absolument inacceptable, irrecevable.
Et parfois en plein hiver, il arrivait de perdre des journées entières, à cause du gel.

En plus des réunions hebdomadaires avec l’entreprise et l’Administration algérienne, nous avions une réunion mensuelle avec les cadres allemands de l’entreprise.A noter que l’un d’entre eux refusait de monter à Tiaret car il avait peur des attentats. Il restait donc à Alger et participait à cette réunion par téléphone. En effet on n’avait pas encore les logiciels pour tenir les réunions videos à distance par internet.

Il est clair que le gel et la neige omniprésente perturbaient sérieusement les travaux, dont le sol se transformait en une boue épaisse qui collait aux chaussures de chantier.
Gros nettoyage des chaussures tous les soirs, de retour du boulot, avant de monter à l’appartement.

A midi je prenais mes repas, sans vin, au restaurant de l’hôtel, tandis que Bachir moins fortuné se débrouillait autrement. Parfois on buvait à l’appartement un peu de vin rosé, mais il fallait ensuite prendre des mesures pour bien en camoufler l’odeur: croquer des grains de café, puis manger des feuilles de menthe, suivies de feuilles de salade, et enfin boire un café bien chaud. Mais ce n’était pas très efficace car dans une société qui ne boit pas, le buveur est facilement identifié par une foule de détails: la manière de marcher, et de parler ou même de garer sa voiture. Et alors c’est la achouma, la honte qui s’abat sur le buveur bavard hérétique et sur sa famille. Et durant ses dix dernières années il fallait vraiment boire en cachette, car c’était un motif suffisant pour être enlevé et décapité par les terroristes. Idem, pour ceux qui fumaient dans la rue. Ou écoutaient de la musique. Heureusement lors de mon séjour, la situation s’était améliorée.

Les moines de Tibihrine

9 ans auparavant les 7 moines de Tibihrine, village proche de Tiaret, avaient été assassinés dans leur monastère. C’était un endroit où les étudiants étaient les bienvenus pour leurs révisions avant les examens ou concours de fin d’année.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Assassinat_des_moines_de_Tibhirine

https://www.jeuneafrique.com/mag/334538/societe/algerie-moi-pere-jean-pierre-schumacher-dernier-moine-de-tibhirine/

https://www.jeuneafrique.com/mag/334538/societe/algerie-moi-pere-jean-pierre-schumacher-dernier-moine-de-tibhirine/

Le chantier avançait bon train, prévu avec un délai de 2 ans, mais comme il avait démarré avec 6 mois de retard, nous allions tout droit vers un dépassement de délai. Nous avons reçu la visite du ministre des travaux publics (ex-futur premier ministre, aujourd’hui en prison) inflexible sur la nécessité de terminer à temps.

Quant à moi, ça faisait maintenant une année que j’étais à Tiaret, en Algérie et je commençais à en avoir assez. C’est alors que je reçois par mail une offre d’emploi, pour une mission au Tchad.
Je suis surpris car je n’ai rien demandé à personne! Puis en lisant attentivement ce message, qui me parvient de SOFRIGO, un bureau d’études travaillant à l’international, je réalise en regardant l’adresse mail de l’expéditeur, que son nom me dit quelque chose.

Ca y est, ça me revient, ce gars je l’ai rencontré lors d’un colloque auquel j’étais invité il y a un an, par l’université d’été de Parly 2.

Je réponds donc par mail que je suis intéressé mais que j’ai besoin de plus de renseignements. Alors il me propose un entretien téléphonique. Le lendemain je l’ai au bout du fil et il m’explique que le Ministère de l’Hydraulique avait lancé un appel d’offres auprès des bureaux d’études internationaux pour la mission d’assistance technique, de suivi et de contrôle d’un programme d’hydraulique rural pour l’alimentation en eau potable de 2000 villages du Tchad. Financé par l’UE (9ème FED, « eau potable dans les villages »).
Et cet appel d’offres,c’est SOFRIGO qui vient de le gagner.

SOFRIGO est donc en train de consulter pour constituer l’équipe d’assistance technique qui comprendra, en plus des aspects techniques (forages, pompes manuelles, groupes électrogènes, châteaux d’eau) un volet social important de communication avec les populations bénéficiaires du projet, pour leur permettre de bien exploiter leurs points d’eau.

Il s’agit ici de renforcer l’accès à l’eau potable pour atteindre un taux de 60 % de desserte en eau potable dans les zones rurales. Seront réalisés deux milles forages équipés de 2000 pompes électriques immergées alimentées par 2000 groupes électrogènes, et 2000 châteaux d’eau surélevés. Seront aussi créés 2000 Comités de Gestion de Point d’Eau dotés d’une reconnaissance juridique,  et formation de 2000 artisans réparateurs responsables du fonctionnement du pompage dans chaque forage. Et enfin la création d’ateliers spécialisés régionaux pour la réparation des groupes électrogènes et la gestion de stocks de pièces détachées .

Je suis proposé, non pas comme chef de mission, comme d’habitude mais comme expert hydraulicien sociologue, créateur de l’IEC NTIC (Information, éducation, communication utilisant les nouvelles technologie de l’information et de l’éducation).

https://www.artouest.org/web/meda/maroc/programme.html

Dans l’offre de SOFRIGO mon profil est présenté comme suit:

Mr MEYER, expert hydraulicien, sociologue résident, dispose de plus 16 ans d’expérience dans le domaine de l’aide au développement en milieu rural et urbain dans les secteurs de l’approvisionnement en eau potable, assainissement autonome et collectif, maîtrise d’œuvre sociale IEC en pays ACP majoritairement. Il a une forte expérience en Afrique y compris dans la région sahélienne (Mauritanie, Mali, Maroc, Algérie, Niger) mais aussi dans des pays au contexte similaire sur des projets hydrauliques et/ou assainissement. Il a plus particulièrement travaillé sur la coordination et supervision d’opérations techniques ainsi que sur l’identification de besoins, diagnostic de l’existant, conception, réalisation d’études (faisabilité, APS, APD), élaboration de dossier d’appel d’offres (service et travaux), assistance à passation de marchés, suivi et contrôle de travaux. Il totalise 9 années au poste de chef de mission sur des projets à composante hydraulique en pays ACP pour la plupart, ce qui lui a permis de développer d’excellentes capacités de rédaction, d’analyse et de communication. Il  a élaboré des plans d’hydraulique villageoise et d’assainissement pour la planification / priorisation des investissements dans le domaine d’approvisionnement en eau et assainissement, des études de faisabilité, étude d’avant projet sommaire, étude d’avant projet détaillé, élaboration de dossier de consultation des entreprises des travaux. Son champ d’expérience couvre aussi le diagnostic des installations, la supervision des travaux des ouvrages et l’installation de production, le stockage et la distribution d’eau potable ainsi que l’appui à la gestion et la maintenance.

Il vaut mieux entendre ça que d’être sourd 🙂

Je réponds donc par mail que je suis intéressé mais que j’ai besoin de plus de renseignements. Alors il me propose un entretien téléphonique. Le lendemain je l’ai au bout du fil et il m’explique que le Ministère de l’Hydraulique avait lancé un appel d’offres auprès des bureaux d’études internationaux pour la mission d’assistance technique, de suivi et de contrôle d’un programme d’hydraulique rural pour l’alimentation en eau potable de 2000 villages du Tchad. Financé par l’UE (9ème FED, « eau potable dans les villages »).
Et cet appel d’offres,c’est SOFRIGO qui vient de le gagner.

Quant à moi je suis proposé non pas comme chef de la mission de suivi et contrôle, mais comme expert sociologue, en pointant sur mes compétence en IEC NTIC, « Information, Education, Communication par les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication ».

Il vaut mieux entendre ça que d’être sourd!

Je formule donc mon accord à SOFRIGO pour ce poste au Tchad, et je rédige immédiatement ma lettre de démission que j’adresse à STUCKY;

Suite: voir TCHAD

.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *